Fiction

Confiance Brisée

Le major Agus Santoso, casque bleu des Nations unies au Liban, croit en la bonté inhérente de l'humanité. Lorsqu'un visage familier apparaît à son poste de contrôle, Santoso doit choisir entre le devoir et la compassion. Alors que les tensions s'exacerbent et que le danger s'intensifie, sa décision remet en cause tout ce qu'il incarne. Dans ce thriller militaire captivant, l'intégrité d'un homme devient le véritable champ de bataille, où les idéaux du maintien de la paix se heurtent aux dures réalités. La foi de Santoso en l'humanité sera-t-elle sa plus grande force ou sa faiblesse fatale ?

Sep 24, 2024  |   14 min read
Confiance Brisée
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Chapitre 1 - L'accident et le sauvetage

Le major Agus Santoso s'accroche au volant du SUV de l'ONU, scrutant la route sinueuse du Liban. Alors que le soleil de fin d'apr�s-midi projette de longues ombres, ses pens�es d�rivent vers sa famille en Indon�sie - le sourire de Siti, les rires de ses enfants. Six mois apr�s le d�but de son d�ploiement, la s�paration p�se lourd.

Le SUV a pris un virage serr�. Les mains de Santoso se resserrent instinctivement sur le volant. La route longe le bord d'un ravin escarp�, avec � peine un m�tre d'accotement en gravier entre le marquage de la voie et une chute vertigineuse.

Au moment o� le SUV prend le virage, Santoso aper�oit une voiture renvers�e, en proie aux flammes. Une fum�e sombre s'�l�ve vers le ciel. Des cris s'�l�vent de l'int�rieur de l'�pave.

L'entra�nement prend le dessus. Santoso arr�te le SUV de mani�re contr�l�e, l'orientant de mani�re � bloquer la circulation. Il sprinte vers l'�pave en flammes et demande par radio une intervention d'urgence.

La chaleur des flammes l'envahit � mesure qu'il s'approche. Les yeux de Santoso parcourent l'�pave, �valuant la situation. La M�gane beige repose sur le c�t� conducteur, la porti�re �cras�e contre l'asphalte. Le pare-brise est fissur� mais reste intact. Les flammes s'�chappent rapidement du moteur.

Santoso enroule sa veste d'uniforme autour de ses mains pour se prot�ger. Il frappe le pare-brise avec son coude et le verre se brise en mini-�clats.

En se penchant � l'int�rieur de la voiture, Santoso aper�oit le conducteur avec du sang sur le c�t� de la t�te, mais il est encore conscient. Santoso d�gagea le reste du verre du cadre du pare-brise.

Il appela en arabe : � Tu m'entends ? Je vais te sortir de l� ! �

Les yeux de l'homme se fixent sur Santoso, �carquill�s par la peur. Santoso s'�tira davantage, grima�ant
lorsque les �clats de verre racl�rent ses bras. Ses doigts trouv�rent l'ouverture de la ceinture de s�curit�.

� Je t'ai �, dit Santoso. � Pouvez-vous vous approcher de moi ? �

L'homme l�ve faiblement les bras. En serrant les dents, Santoso saisit les poignets de l'homme et le souleva pour le d�gager � travers le cadre du pare-brise bris�.

Ils avaient � peine parcouru une dizaine de m�tres qu'une boule de feu jaillit de l'�pave, les projetant tous deux au sol.

Pendant plusieurs secondes, Santoso resta abasourdi. Puis son entra�nement reprit le dessus. Il se redressa et s'occupa de l'homme secouru.

Bien qu'�tourdi, le conducteur �tait vivant. Les mains de Santoso bougent efficacement, �valuant les blessures. � Les secours arrivent. Quel est votre nom ? �

� Omar... Al-Rashid �, chuchote l'homme. � Vous... vous m'avez sauv� la vie. �

� Y avait-il quelqu'un d'autre avec vous dans la voiture ? �

� Non... �

Santoso fait un bandage de fortune avec sa chemise.

La main d'Omar saisit le poignet de Santoso. � Une dette... Une dette de vie. Je te dois... �

Avant que Santoso ne puisse r�pondre, les sir�nes retentissent. Les secouristes s'empressent autour d'eux, aidant le conducteur et le pr�parant pour le transport. Un autre secouriste finit de soigner les blessures de Santoso tandis qu'ils chargent Omar dans une ambulance.

Lorsque les v�hicules d'urgence sont partis, l'adr�naline est retomb�e, laissant Santoso exsangue mais satisfait. Les mots d'Omar sur la dette d'une vie r�sonnent dans son esprit, un concept qui a une signification profonde dans cette r�gion.

***

Six mois plus tard, Santoso prend place en bout de table pour une r�union d'�quipe. � Bonjour � tous. Apr�s avoir pr�sent� le nouveau membre de l'�quipe, le sous-lieutenant Siti Rahma, Santoso se tourne vers le premier lieutenant Budi Prakoso. � Lieutenant, je crois que vous avez des inqui�tudes � partager.

Prakoso se leva, la
tension �vidente dans son corps. � Merci, monsieur. Je suis tr�s pr�occup� par notre situation en mati�re de s�curit�. �

Il �tale une carte sur la table, indiquant les zones o� l'activit� militante s'intensifie. � Avec tout le respect que je vous dois, monsieur, nous devons envisager une attitude plus agressive.

� Merci, lieutenant. Votre diligence est louable, et nous devons prendre ces menaces au s�rieux. Toutefois, nous devons �galement veiller � ne pas r�agir de mani�re excessive. �

Santoso a racont� l'incident de sauvetage, l'utilisant comme un exemple d'humanit� partag�e transcendant les lignes de conflit.

Le capitaine Rahman a jou� le r�le de m�diateur dans la discussion, soutenant le leadership de Santoso tout en reconnaissant la validit� des pr�occupations soulev�es.

� la fin de la r�union, le capitaine Santoso a d�crit la rotation � venir pour s�curiser un point de contr�le critique. Il insista sur le maintien d'une attitude pacifique, alors m�me que le sergent de premi�re classe Dian Kusuma ajoutait discr�tement des munitions � leur dotation de base.

Le lieutenant Santoso lib�ra l'�quipe et resta en arri�re pour �tudier la carte. Il a trac� l'itin�raire jusqu'au point de contr�le de l'ONU qu'ils allaient devoir tenir. S'assurer de son bon fonctionnement permettrait de remplir l'objectif de leur mission. Mais si les choses tournaient mal...

Santoso resta en arri�re, �tudiant la carte et l'itin�raire vers le poste de contr�le qui leur avait �t� assign�. Il chassa ses doutes et r�affirma sa foi en la bont� de l'humanit� - la raison m�me pour laquelle il avait rejoint cette force. Ses hommes feront preuve de professionnalisme tout en assurant la s�curit� dans cette r�gion d�chir�e par la guerre.

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Chapitre 2 - Le dilemme

Le major Santoso entre dans le QG de la FINUL et se dirige vers son bureau encombr�. Alors qu'il tape son rapport, le capitaine Rahman s'approche pour lui
faire part de renseignements inqui�tants sur les activit�s des militants et les failles de s�curit�. Santoso absorbe les nouvelles, la m�choire serr�e, avant d'informer ses coll�gues de sa visite au poste de contr�le.

Le 1LT Prakoso accueille Santoso au poste de contr�le de Delta. Dans la salle des op�rations, il montre les mouvements suspects sur une carte murale.

� Trafic au point de contr�le ? demande le lieutenant Santoso.

� Plus l�ger que d'habitude. Le manque d'activit� me pr�occupe. �

Santoso acquiesce, il comprend. � Continuez � surveiller ces zones. Je vais observer de l'avant pendant un moment. �

Il arpente le poste de contr�le, d�sireux d'�valuer la situation de premi�re main.

Alors que ses yeux balayaient la route d'acc�s, une silhouette famili�re attira son attention. Le c?ur de Santoso bat la chamade lorsqu'il reconna�t l'homme qui se dirige vers le poste de contr�le : Omar Al-Rashid, celui-l� m�me qu'il avait sorti de l'�pave en flammes il y a six mois.

La d�marche d'Omar �tait r�guli�re, mais Santoso d�cela une pointe de nervosit� dans son comportement. Que fait-il ici ? La co�ncidence de son apparition, surtout si l'on tient compte des r�cents rapports des services de renseignements, fit froid dans le dos de Santoso.

For�ant son expression � rester neutre, Santoso observa les r�actions de son �quipe � l'approche d'Omar. Le caporal Al-Masri donna un coup de coude au sergent Kusuma, murmurant quelque chose que Santoso ne put saisir. La main de Kusuma se dirigea vers son arme, sa posture se transformant en alerte maximale.

Alors qu'Omar se rapprochait, Santoso pensa � sa formation militaire. Le souvenir s'estompa, remplac� par l'image du visage reconnaissant d'Omar apr�s le sauvetage, ses mots sur la dette d'une vie r�sonnant dans les oreilles de Santoso. Les deux souvenirs s'affrontaient en lui, le devoir et la compassion le poussant dans des directions oppos�es.

L'esprit de
Santoso se d�bat entre la prudence, aliment�e par l'arriv�e inattendue d'Omar et ses r�cents renseignements, et la foi en la bont� de l'humanit�.

Avant qu'il ne puisse se remettre en question, Santoso s'est avanc� et s'est adress� � l'�quipe du poste de contr�le. � Repos �, ordonna-t-il, notant la tension dans leurs postures. � Je connais cet homme. Il n'est pas une menace. �

Les yeux du lieutenant Prakoso se r�tr�cirent, un scepticisme �vident se dessinant sur son visage. � Monsieur, avec tout le respect que je vous dois... �

Santoso leva la main, coupant court � l'objection. � Je comprends votre inqui�tude, lieutenant. Mais je me porte garant de lui. Je lui parlerai moi-m�me. �

Santoso leva la main, faisant signe � Omar avec un sourire qui d�mentait la tension qu'il ressentait dans ses entrailles. Il fit signe � l'homme qui s'approchait, observant le soulagement qui se lisait sur les traits d'Omar.

� As-salaam-alaikum, major Santoso �, dit Omar en acc�l�rant le pas.

� Wa-alaikum-salaam, Omar �, r�pondit Santoso en lui tendant la main. � Quelle surprise de vous voir ici.

Ils se serr�rent fermement la main, la poign�e ravivant les souvenirs de leur premi�re rencontre. La vision p�riph�rique de Santoso per�oit les subtils changements de posture de son �quipe. La m�choire de Prakoso se serra, tandis que la main de Kusuma resta pr�s de son arme.

� S'il vous pla�t, entrez �, dit Santoso en guidant Omar vers le b�timent du poste de contr�le. � Il y fait plus frais et nous pourrons parler plus confortablement. �

Lorsqu'ils sont entr�s, Santoso a senti le poids des regards de son �quipe sur son dos. Il conduit Omar vers une chaise dans la salle d'attente et s'assoit en face de lui.

� Alors, Omar, qu'est-ce qui vous am�ne � notre point de contr�le aujourd'hui ? � demande Santoso, sur un
ton d�contract� malgr� la curiosit� qui le ronge.

Les yeux d'Omar parcourent la pi�ce avant de se poser sur Santoso. � J'�tais de passage dans la r�gion pour affaires. Je ne m'attendais pas � vous voir ici, major. C'est la volont� divine d'Allah que nos chemins se croisent � nouveau. �

Santoso acquies�a, un sourire poli fix� sur son visage. � En effet, il semble que le destin nous ait r�unis une fois de plus. Comment allez-vous depuis l'accident ? �

Alors qu'Omar commen�ait � d�crire son r�tablissement, l'?il exerc� de Santoso ne put s'emp�cher de remarquer que la veste d'Omar pendait bizarrement, des bourrelets peu naturels venant perturber son drap�. Le regard du major se porte sur la main gauche d'Omar, fermement serr�e sur ses genoux.

Un frisson parcourut l'�chine de Santoso. Avait-il commis une grave erreur de jugement ? Le poids de sa d�cision de se porter garant d'Omar lui p�se, mena�ant d'�craser l'air de ses poumons.

� Je dois admettre une fois de plus, Major, � dit Omar, tirant Santoso de ses pens�es en spirale. � Je ne m'attendais pas � vous voir ici aujourd'hui. Mais je suis ravi de retrouver mon sauveteur. J'ai souvent pens� � ce jour-l�, � la fa�on dont les choses auraient pu �tre diff�rentes si vous n'�tiez pas venu �.

Santoso se for�a � se concentrer sur les paroles d'Omar, repoussant son malaise grandissant. � Je suis heureux d'avoir pu vous aider. � Notre mission ici a ses d�fis �, admit Santoso, ses yeux se posant sur les bourrelets de la veste d'Omar. � Mais nous croyons en ce que nous faisons ici.

Une lueur d'espoir - culpabilit� ? peur ? - passe sur le visage d'Omar. � Bien s�r. Et le peuple libanais appr�cie votre pr�sence, m�me si certains... individus malavis�s pourraient dire le contraire. �

L'esprit de Santoso
s'emballa en observant le comportement de plus en plus nerveux d'Omar. Les bourrelets dans la veste d'Omar et sa main gauche crisp�e d�clench�rent des signaux d'alarme dans la t�te du major. Il devait agir, mais la prudence �tait de mise. Ses yeux se port�rent sur l'interrupteur d'alarme situ� � l'autre bout de la pi�ce, dont la surface rouge �tait un symbole d'espoir et de d�sastre potentiel.

Un souvenir de sa formation refit surface. � Dans les situations tendues, gardez votre sang-froid et cherchez � obtenir un avantage tactique �, r�sonna la voix de son instructeur dans son esprit. Santoso prit une profonde inspiration pour se stabiliser.

� Mes excuses, Omar �, dit Santoso en for�ant un sourire. � O� sont mes mani�res ? Voulez-vous une tasse de caf� ? Ce n'est pas le meilleur, mais il est chaud et cors�. �

Les yeux d'Omar s'�carquillent l�g�rement, puis il acquiesce. � Ce serait tr�s aimable, merci. �

Santoso se leva, ses mouvements �tant calcul�s pour �tre lents et d�contract�s. � Cela ne prendra qu'un instant. Notre salle de repos est juste l�.

Alors qu'il se dirigeait vers la petite kitchenette, Santoso sentit ses sens s'aiguiser. Il pouvait entendre les voix �touff�es de son �quipe � l'ext�rieur, le ronronnement de l'air conditionn� et sa propre respiration mesur�e. La cafeti�re �tait pos�e sur un comptoir, � deux pas du bouton rouge de l'alarme.

Santoso s'affaira � pr�parer le caf�, dos � Omar, mais les oreilles attentives � tous les bruits de la pi�ce. Il entendit le doux bruissement d'un tissu lorsqu'Omar se d�pla�a sur sa chaise, suivi d'un l�ger soupir.

� Comment prenez-vous votre caf�, Omar ? demanda Santoso en jetant un coup d'?il par-dessus son �paule.

� Noir, s'il vous pla�t �, r�pondit Omar, la voix tendue.

Santoso s'affaira � pr�parer le caf�, tout en restant attentif aux mouvements d'Omar et
au bouton d'alarme qui se trouvait � proximit�. Pendant qu'il versait le caf�, il remarqua qu'Omar consultait sa montre � plusieurs reprises, les jambes rebondissant nerveusement.

Santoso en conclut qu'il a peut-�tre mis l'ensemble du poste de contr�le en danger imm�diat.

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Chapitre 3 - Le bilan

Le major Santoso se d�tourna du comptoir, la cafeti�re � la main, au moment o� Omar se levait d'un bond. Omar porte sa main gauche � sa poitrine, le pouce pos� sur un bouton rouge, et ses yeux brillent d'une intensit� fanatique.

� J'ai pay� ma dette. Merci de m'avoir donn� cette opportunit�. � d�clara Omar, d'une voix ferme et froide.

Les mots rest�rent suspendus dans l'air pendant une fraction de seconde, leur v�ritable signification s'abattant sur Santoso dans une vague de r�alisation horrifi�e. La cafeti�re lui �chappa, se brisant sur le sol alors que le temps semblait s'�tre arr�t�.

Dans ce moment �ternel, l'esprit de Santoso s'emballe. Tous les d�tails suspects qu'il avait remarqu�s - la veste volumineuse, le comportement nerveux d'Omar, les rapports des services de renseignement faisant �tat d'une activit� militante accrue - se fondaient en une v�rit� unique et d�vastatrice. Il s'�tait tromp�. Une erreur catastrophique, impardonnable, sans aucun moyen apparent de l'inverser.

Le corps de Santoso r�agit par pur instinct, affin� par des ann�es d'entra�nement. Il s'�lan�a vers le bouton d'alarme, le bras tendu, les doigts s'effor�ant de couvrir la distance apparemment insurmontable de quelques centim�tres.

Simultan�ment, les yeux d'Omar s'�carquill�rent d'une fureur d�moniaque. Leurs regards se crois�rent pour un dernier instant, �ternel, et un maelstr�m d'�motions passa entre eux. Trahison. La d�termination. Une lueur de regret, engloutie par une d�termination � toute �preuve.

Les doigts de Santoso effleurent le plastique lisse de l'alarme au moment o� le pouce d'Omar se pose sur le d�tonateur.

Le monde explose.

Un grondement assourdissant et un �clair aveuglant engloutirent le poste de contr�le.
L'onde de choc frappa Santoso en arri�re, le faisant passer � travers la fen�tre de la kitchenette.

La conscience de Santoso s'est fragment�e, r�duite � des impressions sensorielles d�cousues. L'odeur �cre de la fum�e et des explosifs. Le go�t m�tallique du sang dans sa bouche. La fum�e lui pique les yeux. Ses oreilles saignent, �touffant la cacophonie des cris et des d�bris qui s'effondrent en un lointain �cho sous-marin.

La douleur s'�panouit sur tout son corps, une constellation d'agonie alors que des �clats d'obus pimentent sa peau et que l'impact de son atterrissage envoie des ondes de choc � travers ses os. Santoso cligna des yeux, essayant d'�claircir sa vision, mais le monde restait un brouillard de fum�e et de poussi�re.

La voix famili�re de Prakoso per�a les oreilles de Santoso. Le lieutenant aboya des ordres, ralliant les survivants. Ses mots �taient flous, mais son ton commandait l'action.

Santoso tenta de se relever, de se joindre aux efforts, mais son corps refusa de coop�rer. Une douleur aigu� lui transperce la poitrine � chaque respiration difficile. Il go�ta le cuivre, sentit une chaude humidit� sur ses l�vres. Il s'agit d'une h�morragie interne, lui dit son esprit d'un point de vue clinique.

Alors que le choc initial s'estompait, la culpabilit� s'est abattue sur Santoso en vagues suffocantes. C'�tait sa faute. Sa d�cision de faire confiance � Omar, de laisser la compassion l'emporter sur la prudence, avait conduit � cette d�vastation. Il avait manqu� � son devoir, n'avait pas su prot�ger ceux qui �taient sous son commandement.

La fum�e se dissipe, r�v�lant l'int�rieur du poste de contr�le. Santoso aper�ut les corps mutil�s du caporal Al-Masri et du sergent Kusuma pr�s de l'entr�e en ruine. Leurs yeux sans vie l'accusent et la responsabilit� l'�crase.

Il devait faire quelque chose. Il devait aider, essayer d'att�nuer les d�g�ts qu'il avait caus�s. Serrant les
dents contre la douleur, Santoso tenta de se lever. Ses jambes s'affaiss�rent, refusant de supporter son poids. Un sanglot �touff� de frustration lui �chappa lorsqu'il r�alisa l'�tendue de ses blessures.

Sans se d�courager, Santoso se tra�na sur le sol jonch� de d�bris. Chaque mouvement provoquait de nouvelles vagues d'agonie dans son corps, mais il continuait � avancer, pouss� par un besoin d�sesp�r� de rejoindre son �quipe, de faire quelque chose, n'importe quoi, pour l'aider.

Alors qu'il avan�ait en rampant, le regard de Santoso fut attir� par le trou b�ant creus� dans le mur d'entr�e du b�timent administratif. Par l�, il pouvait voir les d�fenses ext�rieures du poste de contr�le - ou ce qu'il en restait. L'explosion avait r�duit les barri�res et les points de contr�le soigneusement construits � du m�tal tordu et du b�ton �clat�.

Un mouvement attire son attention. Une camionnette blanche se dirigeait vers le poste de contr�le en ruine, se faufilant entre les d�bris avec une d�termination �vidente. Le sang de Santoso se gla�a lorsque son entra�nement militaire se mit en marche, reconnaissant instinctivement la menace.

� Non �, murmura-t-il, la voix rauque. Puis plus fort, mobilisant toutes les forces qui lui restaient : � Non ! Van ! Bombe ! �

L'avertissement de Santoso �tait presque inaudible au milieu du chaos qui les entourait. Il fixa le lieutenant Prakoso dans les yeux, voulant que l'homme comprenne. La t�te de Prakoso se retourna, suivant le regard d�sesp�r� de Santoso vers le v�hicule qui approchait.

Le temps semblait ralentir, �tirant chaque seconde en une �ternit�. Santoso regarda, impuissant, la camionnette franchir � toute allure le poste de contr�le d�truit. Il aper�ut le visage du conducteur, tordu par la m�me d�termination fanatique qu'il avait vue dans les derniers instants d'Omar.

En cet instant suspendu, une cascade de regrets envahit l'esprit de Santoso. Il pense � sa
famille rest�e en Indon�sie - Siti, Budi, Aisyah. Il avait promis de revenir les voir, d'�tre l� pour le prochain anniversaire de Budi. Aujourd'hui, il r�alise avec angoisse qu'il va manquer cet anniversaire. Tout lui manquerait.

Il pensa � son �quipe, aux hommes et aux femmes qu'il avait jur� de diriger et de prot�ger. Combien �taient d�j� morts � cause de son erreur ? Combien d'autres allaient p�rir dans les prochaines secondes ?

La mission de maintien de la paix, les id�aux auxquels il avait consacr� sa vie, tout cela s'�croulait autour de lui, physiquement et m�taphoriquement. Alors qu'il s'effor�ait d'incarner l'esprit de paix et de coop�ration, il avait involontairement ouvert la porte � la destruction.

Alors que la camionnette explose dans une gigantesque boule de feu, engloutissant ce qui reste du Checkpoint Delta, la derni�re pens�e de Santoso est une pri�re d�sesp�r�e. Pas pour lui, mais pour ceux qu'il laissait derri�re lui, pour que sa famille trouve la paix, pour que son �quipe soit �pargn�e, pour que cette trag�die soit b�n�fique, aussi minime soit-elle.

L'onde de choc a frapp�. Le major Agus Santoso et sa section n'en savent pas plus.

***

La sc�ne s'est d�plac�e, en reculant et en remontant. La vue s'�l�ve, r�v�lant lentement l'�tendue de la d�vastation en contrebas.

L� o� se trouvait le point de contr�le Delta, un crat�re fumant marque d�sormais la terre. La force des explosions a projet� des morceaux de m�tal et de b�ton sur des centaines de m�tres, �parpillant les d�bris sur une vaste zone. De petits incendies br�lent encore ici et l�, projetant des volutes de fum�e noire dans l'air.

L'�troite route d'acc�s au poste de contr�le est m�connaissable, ses barri�res de b�ton serpentines r�duites � l'�tat de ruines. Le b�timent administratif, autrefois symbole d'ordre et d'autorit�, n'�tait plus qu'un amas de m�tal tordu et de verre bris�.

La vue
qui s'�largit r�v�le un contraste saisissant. Au-del� de la zone d'explosion, les collines libanaises intactes pr�sentent une v�g�tation broussailleuse. Une oliveraie lointaine incarne la r�silience de la r�gion.

La cam�ra a fait un panoramique, captant un mouvement � l'horizon. Un convoi de v�hicules s'approche rapidement, leurs sir�nes �tant audibles m�me � cette distance. Les premiers intervenants des positions voisines de la FINUL se sont pr�cipit�s pour apporter leur aide.

Les ambulances et les camions de pompiers convergent vers la sc�ne, leurs gyrophares sont une intrusion discordante dans le calme inqui�tant qui s'est install� sur le poste de contr�le d�vast�. Le personnel m�dical, coiff� de casques bleus distinctifs, sort des v�hicules et se d�ploie en �ventail � la recherche de survivants.

La vue s'�largit, r�v�lant le terrain meurtri du Sud-Liban. D'anciennes et de nouvelles marques de conflit pars�ment le paysage, � c�t� de signes de r�silience : des villages reconstruits, des champs cultiv�s et une vie persistante.

La sc�ne est devenue noire, pr�servant la m�moire de Checkpoint Delta et de son personnel - un chapitre bref mais poignant de la lutte pour la paix dans la r�gion.

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Remerciements

Je tiens � adresser un remerciement tout particulier � Reedsy Prompts pour avoir fourni le sujet d'�criture qui a inspir� cette histoire. Lors de leur concours hebdomadaire n�257, le sujet �tait : � �crire une histoire sur un h�ros tragique �. Ce sujet �vocateur a stimul� mon imagination et a conduit � la cr�ation de cette ?uvre. Je suis reconnaissant envers l'�quipe de Reedsy pour avoir cultiv� une communaut� dynamique d'�crivains et pour offrir ces d�fis stimulants. Leur plateforme et leurs ressources ont �t� inestimables. Vous pouvez trouver le lien vers leurs sujets d'�criture cr�ative sur https://blog.reedsy.com/creative-writing-prompts.

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